Après de longs mois de tergiversations, le parlement bruxellois a enfin adopté la proposition d’ordonnance déposée par le gouvernement et visant à limiter pour une durée d’un an l’indexation des loyers des logements les plus énergivores.
Cette mesure, entrée en vigueur le 14 octobre 2022, vise à interdire pour une durée d’un an l’indexation des loyers des logements dits « passoires énergétiques ». Les propriétaires ne disposant pas de certificat PEB ou n’ayant pas enregistré le bail ne pourront plus non plus indexer le loyer. Alors, véritable mesure sociale et environnementale ou effet d’annonce ?
Un peu de contexte
Les négociations au sein du gouvernement bruxellois autour de l’indexation des loyers remontent déjà au mois de janvier 2022, lorsque la Secrétaire d’État au Logement Nawal Ben Hamou avait déposé une proposition visant à plafonner l’indexation des loyers à 2% pour l’année 2022, voire au-delà. Malheureusement, la majorité régionale n’avait pu alors se mettre d’accord sur cette proposition, le blocage semblant résulter d’un veto du parti Défi et des réticences de l’Open Vld.
Pour rappel, le mécanisme d’indexation des loyers se base sur l’indice santé, qui lui-même est déduit de l’indice des prix à la consommation, qui reflète l’évolution des prix de tous les biens et services. En résumé, l’indexation des loyers doit permettre aux propriétaires de faire face à l’augmentation de l’inflation… Mais l’évolution du prix des loyers à Bruxelles, la Région la plus pauvre de Belgique, dépasse largement celle de l’inflation et ce, depuis de nombreuses années ! En effet, ces 10 dernières années, les loyers ont augmenté de 20 % au-delà de l’indexation.
La mesure sous la loupe
Selon ce système, les loyers des logements bruxellois dotés d’un certificat PEB G ou F – qu’on appelle aussi des « passoires énergétiques » –, ne pourront plus être indexés. L’indexation pourra être appliquée à 50 % pour les logements dotés d’un PEB E et à 100% pour les logements dotés d’un PEB A, B, C ou D.
À noter également que les propriétaires n’ayant pas annexé le certificat de performance énergétique au bail ou n’ayant pas enregistré le bail ne pourront pas non plus indexer le loyer. Vous pouvez aisément vérifier sur le site de MyMinfin si le ou la propriétaire de votre logement a bien effectué l’enregistrement du bail.
La double peine pour les locataires précarisé·es
Malheureusement, les locataires dont le loyer a été indexé avant la date du 14 octobre 2022 n’auront pas de recours possible, la mesure n’étant pas rétroactive, ce que nous déplorons étant donné que la crise énergétique ne date pas d’hier. Encore une fois, les locataires payent au prix fort la lenteur du processus décisionnel politique et les réticences de certains partis.
Les locataires représentent en effet 62% des ménages bruxellois, la grande majorité d’entre eux étant logés dans le privé. Par ailleurs, les Bruxellois×es consacrent en moyenne 35 % de leur budget au coût du logement (loyer et charges), cette moyenne dissimulant néanmoins de véritables disparités entre les ménages.
La FéBUL, aux côtés d’autres associations du secteur social, déplore par ailleurs la durée limitée de cette mesure. Un an est, en effet, un délai bien trop court pour encourager les propriétaires à effectuer des travaux de rénovation et d’isolation de leur bien et rien n’empêchera les propriétaires de ces logements insalubres ou mal isolés à indexer à nouveau le loyer lorsque la mesure prendra fin.
Allons plus loin : encadrons les loyers !
Au-delà de la question de l’indexation, nous revendiquons depuis plusieurs années un encadrement généralisé des loyers et au minimum pour une utilisation optimisée de la grille bruxelloise des loyers afin qu’elle ne soit plus seulement indicative mais contraignante.
Cette grille des loyers de référence non contraignante tient actuellement compte d’une poignée de critères peu représentatifs tels que la taille du bien, le quartier ou encore le certificat énergétique. Depuis le 2 décembre 2021, ce loyer de référence doit obligatoirement figurer sur tout nouveau contrat de bail d’habitation, en plus du loyer réellement demandé. Nous regrettons cependant que la grille ne se base que sur les prix du marché locatif privé existant. Nous prônons donc un encadrement plus strict des loyers et ce, principalement dans les zones où ont été réalisés des investissements publics pour améliorer le cadre de vie des habitant·es et qui engendrent généralement une augmentation des loyers.
Nous revendiquons par ailleurs l’opérationnalité de la Commission paritaire locative, un organe consultatif composé de représentant·es de propriétaires et de locataires nommé·es par le Gouvernement ayant pour mission de rendre un avis sur la justesse des loyers pratiqués et de proposer une conciliation entre propriétaires et locataires.