Il y a quelques mois, les partis de la majorité et un parti de l’opposition déposaient au Parlement bruxellois deux propositions d’ordonnance destinées à définir les contours de la future Commission paritaire locative et de ses missions. Ces deux propositions d’ordonnance ont été examinées par le Conseil Consultatif du Logement et deux avis ont été émis. Retour sur les enjeux liés à ce projet de loi et sur la position de la FéBUL quant aux avancées en cours.
La création de la Commission paritaire locative, prévue pour 2022, devrait permettre d’améliorer l’expertise et la médiation autour des loyers en Région bruxelloise. Cet organe consultatif, composé de représentant·es de propriétaires et de locataires nommé·es par le Gouvernement, aura en effet pour mission de rendre un avis sur la justesse des loyers pratiqués et proposera une conciliation entre propriétaires et locataires. Ce processus, qui ne devrait en aucun cas se substituer aux appareils judiciaires, sera en outre gratuit et constituera, nous l’espérons, un outil efficace pour lutter contre les loyers abusifs pratiqués à Bruxelles.
Si la FéBUL salue avec enthousiasme la perspective d’existence d’une Commission paritaire locative, nous invitons dès lors les pouvoirs publics à impliquer au plus vite dans les discussions les acteurs et actrices de terrain œuvrant au quotidien à l’accompagnement des locataires précarisé·es, afin que cette future Commission paritaire locative puisse être la plus efficace possible dans la lutte contre le mal-logement à Bruxelles.
Mais qu’entendent les parlementaires derrière le concept de loyer abusif ? Pour les partis de la majorité seront considérés comme abusifs les loyers qui présentent une différence de 20 % avec le loyer de référence (statué par la grille des loyers) ou qui, ne dépassant pas le loyer de référence de 20 %, présentent des défauts de qualité substantiels. Cette présomption est renversée si les caractéristiques du bien ou son environnement justifient cette augmentation du montant du loyer par rapport au loyer de référence, ou si les défauts de qualité sont imputables au ou à la locataire. Pour le parti de l’opposition, le loyer est considéré de facto comme abusif à partir du moment où il dépasse les montants prévus par la grille indicative des loyers. On estime aujourd’hui que les loyers abusifs concernent près de 10 % du parc locatif bruxellois, soit + de 30 000 logements…
Notre attention se porte tout particulièrement sur la grille des loyers de référence, en cours d’évaluation (mission confiée par la Région à l’IGEAT (Institut de Gestion de l’Environnement et d’Aménagement du Territoire)). Actuellement, les critères de cette grille sont, selon nous, trop peu nombreux pour refléter au mieux la réalité des loyers pratiqués à Bruxelles. Il est donc primordial que le monde associatif, disposant d’une connaissance accrue du terrain, soit associé à la révision de cette grille. Compte-tenu du constat que nous tirons sur la pratique de loyers trop élevés en région bruxelloise sur le marché privé au regard des revenus des Bruxellois·es, nous insistons pour que la grille ne soit pas construite essentiellement à partir des réalités du marché locatif privé existant. Nous prônons par ailleurs un encadrement plus strict des loyers dans les zones où ont été réalisés des investissements publics pour améliorer le cadre de vie des habitant·es et qui engendrent généralement une augmentation des loyers.
Nous attendons enfin des instances publiques qu’elles valorisent au mieux ce nouvel outil (Commission paritaire) au moyen de larges campagnes d’information et de communication. L’objectif recherché étant, in fine, une meilleure connaissance des recours disponibles pour les locataires en situation précaire.
Pour conclure, nous souhaitons attirer l’attention sur la position de faiblesse des locataires dans la relation collective. Nous craignons que les locataires éprouvent des difficultés à se saisir d’un tel outil, pourtant pertinent en raison, d’une part, de la complexité des démarches (compréhension du cadre et des règles, lourdeur administratives…) et d’autre part, en raison de craintes de représailles (légales ou non) de la part du ou de la propriétaire. Les associations « insertion par le logement » qui accompagnent ces personnes fragilisées auront très certainement un rôle primordial à jouer dans la mise en œuvre de cet outil tant par sa mise en place concrète que dans son fonctionnement futur.
Retrouvez plus d’informations sur la Commission paritaire locative et l’encadrement des loyers en Région bruxelloise dans ces deux articles de L’Écho et Le Soir (accès abonné·es).